mercredi 6 août 2014

La vita è bella

Te souviens-tu de ce film ? Je l'ai revu cette nuit. J'avais oublié combien il m'avait retourné. J'en avais surtout gardé une trace sonore et le bonheur spétaculaire de Benguigui à Cannes. Le revoir hier, me fais réflechir ce matin sur la parentalité. A la naissance de ma fille, tradition oblige, les miens m'ont souhaité tout le bonheur du monde et patati et patata, mais ils m'ont surtout tous souhaité : d'étre un parent digne.

J'ai d'ailleurs répeté cela comme une formule de politesse pendant des années aux jeunes parents que j'ai pu rencontré sans jamais vraiment refléchir au sens même de ces propos. Mais qu'est ce que cela peut-il bien dire ? Est-ce un concept idéaliste ? Est-ce un théoreme avec une méthode de démonstration ? Guido est à ce jour, celui qui se rapproche le plus de ma projection personnelle du parent digne.  Cette pensée m'attriste car me conforte au manque de modéles dans mon entourage. Je l'ai trouvé phénomenalement aimant, d'un courage et d'une abnégation sans limite. Ok c'est un conte, mais quelle merveilleuse image, n'est-ce pas ? 

Mes parents ont divorcé quand j'ai eu 4 ans. Mon pére est parti vivre à l'etranger deux ans plus tard et ma mère a enchainé les histoires d'amour et les mariages. J'ai eu une enfance heureuse. Je crois. Depuis que je suis mère, j'ai des souvenirs de situations, que par je ne sais quel mécanisme, j'avais réussi à refouler en quasi-instantané. Je rongeais mes ongles jusqu'au sang et je mangeais des fourmis et du charbon de bois. Je grattais la peinture au mur également, j'en aimais le contact poudreux et grincant sur mes dents. Pour mes 13 et 14 ans je suis allée passer les vacances d'été chez mon père. Avec sa nouvelle femme. Et mes cinq demi-frere et demi-soeurs. Cette année là, je me suis fais renvoyer de mon collège. Le proviseur m'a injustement accusé de perturber un cours d'arts plastiques. Il m'a giflé pour avoir osé lui répondre. Il a fini à l'hopital, principalement pour soigner sa fierté. C'était les débuts de ma révolte contre l'autorité et de ma vie chez mes grands-parents. Oui, aprés mon escalandre au collége, j'ai pris les devants et ne suis jamais rentrée chez moi. Je suis allée directement chez mes grand-parents. Anticipation, organisation, protection. Ma mère a réussi à me reparler sans avoir un regard meutrier au bout d'un an. 

J'ai 18 ans, elle aussi s'en va vivre à l'étranger. Elle est allée vivre son rève americain. Je viens de foirer pour la seconde fois ma premiere année de droit. Mais avec mon travail étudiant, j'ai quelques économies. Juste ce qu'il faut pour payer un premier semestre en école de commerce. C'est beaucoup de travail et je n'ai pas le temps pour un job étudiant. Anticipation, méthode et organisation. Il me reste trois mois avant la prochaine scolarité. Mon père vient de m'envoyer bouler, non, hors de question de m'aider à financer mes études. Fille indigne ! Pauvre con. Plus que deux mois, j'enchaine les examens et concours. Un mois, je prends un boulot de serveuse. Un jour, j'ai ni l'ombre d'un début de solution robuste ni plus d'un dixième du montant de ma scolarité. J+1, l'entrée en classe est refusée aux étudiants en retard sur leur frais. Je m'écroule, je dors, je mange et je me rendors pendant des jours. J'ai raté l'annonce des résultats. Je suis reçue avec mention au programme exed. La semaine en entreprise, le week-end en classe, pendant 3 ans. Totalement financé, bourse au mérite. Je l'apprends par le responsable du programme qui m'engueule copieusement au téléphone parce que je ne me suis pas présentée chez mon employeur. 

Je m'éloigne de mon sujet dis donc ! Et le parent digne dans tout celà ? Je leur en veux à mes parents d'avoir été absents. Pourtant sans cette absence, serai-je cette femme autonome (applaudissements, stp) et débrouillade. Mais grace à eux, j'ai une vie amoureuse cahotique. Je ne sais pas ce qu'est un parent digne. Je ne sais toujours pas ce qu'est être une femme amoureuse. Je doute que Giosué ait su s'il eut eu une autre vie que celle des camps de concentration, plus ou moins d'aptitudes pour "grandir" que moi. Et pourtant je lui envie tout cet amour reçu, cela dit cet amour c'est moi ce que je vois. Qu'en est-il pour lui ? 

A ce stade de la reflexion, j'en conclus ce jour que c'est moins le temps que mes parents m'ont dédié que l'amour parcimonieux reçu qui a fait la différence. Ils ont du en chemin, surtout ma mère, su me donner juste ce qu'il fallait pour faire la différence. Tu sais ce petit quelque chose qui te fais soit basculer dans le caniveau soit en échapper.

Mon pére est un sombre idiot. Sans lui je n'aurai pas compris qu'il fallait me battre de toute mes forces. Qu'il ne fallait compter que sur moi. Je compte d'ailleurs tellement sur moi et uniquement que mon conjoint ne trouve pas sa place. Ma mère ? Ben c'est ma mère. En 2006 elle a été diagnostiquée schizophrène paranoïde. Elle a quitté tous ses maris en étant convaincue de leur culpabilité sur un sujet ou un autre.

Aujourd'hui, je vais être un parent digne. Je m'en vais donc jouer avec la fille et lui dire autant de fois que possible combien je l'aime. 

Car qui sait, serai-je demain en capacité de lui dire ? 

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